En vogue et sur-médiatisée, la blockchain est, depuis plusieurs années, sur toutes les lèvres. Mais au-delà du phénomène de mode, elle est aussi vivement critiquée pour son impact environnemental significatif. À titre d’exemple, Bitcoin, la plus connue des blockchains, est plus énergivore qu’un pays comme la Norvège ou l’Argentine.
Heureusement, les développeurs et ingénieurs du secteur ont conscience de cette problématique, véritable frein aux développements à grande échelle, et cherchent à proposer des solutions permettant d’en réduire l’impact écologique.
La blockchain, quezaco ?
De nos jours, les échanges commerciaux, qu’ils soient physiques ou numériques, s’organisent entre plusieurs parties prenantes par le biais des banques. Ces échanges ont lieu car l’ensemble des acteurs ont confiance dans le système financier et dans la valeur accordée à la monnaie. Ils ont confiance dans les banques, qui garantissent à elles seules la stabilité économique de l’ensemble.
Mais en 2008, alors que gronde la défiance envers le système financier, des modèles alternatifs émergent. Ainsi nait la première blockchain : le Bitcoin, une technologie à la source des crypto-actifs (actifs et monnaies numériques virtuels qui reposent sur la technologie blockchain) qui résout les problèmes d’intégrité et de validité des transactions dans le temps, sans avoir recours à un intermédiaire central.
Au sein d’une blockchain, tous les participants, qu’on appelle des nœuds, doivent participer au réseau. Ils possèdent tous, sur leur ordinateur, une copie de la base de données contenant toutes les transactions effectuées sur la blockchain. Chaque transaction est enregistrée au sein de ce registre et représentée sous la forme d’un code unique contenant à la fois la liste des parties prenantes et le détail de toutes les transactions.
C’est ce code, obtenu par le biais d’outils cryptographiques complexes lors d’un procédé qu’on appelle le minage, qui est la clé de voûte du système et permet de connecter chaque bloc aux autres, tout en garantissant la validité de la chaîne.
Pour arriver à un tel résultat, la blockchain utilise ce qu’on appelle une fonction de hachage, c’est-à-dire une fonction mathématique permettant, à partir d’une donnée fournie en entrée (une transaction par exemple), de calculer une empreinte numérique unique servant à identifier et valider la donnée initiale. C’est cette empreinte qu’utilise la blockchain pour garantir l’infalsifiabilité des données.
La chaîne étant par ailleurs visible aux yeux de tous, puisque partagée sur tous les postes du réseau, il est possible pour quiconque d’apercevoir et d’identifier l’ensemble des transactions passées et les parties prenantes. C’est ce principe de transparence et de nœuds connectés les uns aux autres qui permet de nourrir la confiance du groupe envers la blockchain, puisqu’il existe toujours une piste de vérification pour garantir l’intégrité d’une transaction. Ainsi, en cas de transaction non-autorisée ou invalide, chaque nœud est notifié. Il est alors possible de remonter jusqu’à la source, soit pour valider, soit pour rejeter la transaction par consensus.
Blockchain, un impact écologique désastreux
Aujourd’hui encore, la majorité des blockchains fonctionnent par « Preuve de Travail » ou « Proof of Work » dans sa version anglaise. La Preuve de travail, qu’est-ce que c’est ? Tout simplement, la bonne exécution des algorithmes par les membres du réseau, pour permettre la validation et l’ajout de nouvelles transactions à leur chaîne.
Évidemment, du fait de sa nature même, et parce que le réseau grandit avec le temps, cette Preuve de Travail est de plus en plus complexe à atteindre. En effet, plus une blockchain est populaire, plus le nombre d’ordinateurs participant au réseau pair-à-pair augmente, et ainsi, sans réévaluation constante de la difficulté des algorithmes cryptographiques, il serait très simple, pour un individu, un groupe d’individus, une entreprise ou même un gouvernement, de prendre possession du réseau.
Pour cette raison, on estime aujourd’hui que la difficulté des algorithmes est telle qu’une transaction sur le réseau Bitcoin requiert plus de 2 000 kWh d’électricité, soit autant que pour alimenter un ménage américain moyen pendant 73 jours. Problème : les transactions sont nombreuses, près de 250 000 par jour, et Bitcoin est loin d’être la seule blockchain en activité.
Vers des solutions alternatives
Dans un objectif de sobriété numérique, il est donc nécessaire de bien réfléchir à la pertinence du recours à la blockchain. Même si cette technologie dispose d’un énorme potentiel pour de nombreux cas d’usage, elle n’est pas adaptée à tous les projets.
Aussi faut-il se poser les bonnes questions :
1. Le projet nécessite-t-il une base de données qui ne soit ni centralisée ni unique ?
Une blockchain, par définition, est une base de données décentralisée et partagée entre tous les nœuds. Il ne faut donc pas que cette propriété nuise à l’objectif des clients.
2. Le caractère publique ou partagé de la blockchain peut-il être utile au projet ?
L’ensemble des données présentes dans une blockchain est visible de tous : sur internet, pour les blockchains dites « publiques », et sur un réseau intranet pour les blockchains dites « privées ». Il faut donc s’assurer que cette visibilité n’ait pas d’impact pour les clients.
3. Le projet implique-t-il des échanges entre plusieurs parties prenantes ?
La blockchain a pour objectif premier de permettre des échanges financiers, de documents, d’information, etc. Mais qui dit échange, dit au minimum deux intervenants. La blockchain peut donc servir uniquement de moyen d’échange entre plusieurs entités.
4. Existe-t-il un impact si l’accès aux données ou les échanges ne sont pas instantanés ?
Une des propriétés de la blockchain concerne le délai de traitement des transactions. Ces dernières peuvent, selon les blockchains, prendre plusieurs minutes à être traitées. Ceci est dû au fait que les nœuds, pour garantir l’infalsifiabilité de la blockchain, doivent vérifier toutes les transactions et arriver à un consensus.
5. Est-il important d’accroître la confiance et la transparence des échanges entre les parties prenantes ?
La blockchain, par définition, permet d’instaurer la confiance et la transparence entre tous les utilisateurs.
6. Le risque que des données soient falsifiées ou dégradées par des manipulations externes est-il actuellement important ?
Les méthodes de consensus intervenant dans la blockchain permettent une non-ingérence dans la base de données des transactions effectuées. Si un utilisateur arrivait à modifier les données dans la blockchain, les autres nœuds détecteraient instantanément un changement et le refuseraient.
La blockchain apporte donc un réel bénéfice si, et seulement s’il existe une défiance potentielle entre des parties prenantes. Ce n’est que dans ces conditions qu’un registre distribué par blockchain et géré par consensus est un outil adapté et pertinent. Si ce n’est pas le cas, il peut être judicieux d’étudier si une autre technologie ou un autre outil ne peuvent pas répondre plus efficacement aux besoins d’un projet, notamment pour éviter de gaspiller des ressources énergétiques inutilement.
La blockchain « par Preuve d’enjeu », une avancée majeure
Comme nous venons de le voir, la Preuve de travail est un mécanisme vivement critiqué pour le coût énergétique qui découle du processus de minage. Mais il existe une solution : l’algorithme de Preuve d’enjeu ! Sa fonction : tenter de résoudre ces problèmes en supprimant le concept de minage et en le remplaçant par un autre processus moins énergivore.
Dans le cadre de la Preuve d’enjeu, tous les utilisateurs du réseau ne sont plus en capacité de miner et donc de valider la création d’un nouveau bloc. Cette tâche est confiée à un seul utilisateur (pseudo)-aléatoirement sélectionné en fonction du poids de ce dernier dans le réseau (par exemple en fonction du montant qu’il a déposé dans le réseau).
Ce processus a pour avantage de dépenser la puissance énergétique d’une seule machine et non plus de toutes les machines du réseau. Selon les estimations, cette méthode pourrait permettre de réduire de près de 99% la consommation énergétique de certaines blockchains. Une solution qui permettrait d’encourager d’avantage l’adoption de cette technologie encore sous-utilisée, aux potentiels multiples.